Analyse : moto chinoise, la nouvelle vague japonaise ? 

Longtemps cantonnées aux petites cylindrées et aux modèles low-cost, les marques chinoises changent de visage. Elles attaquent le segment des trails mid-size avec des arguments solides : tarifs agressifs, équipement pléthori​​que, et des réseaux en plein essor. Analyse d’une dynamique qui commence à inquiéter les géants établis.

Vente: aux portes du Top 10

Le phénomène de la moto chinoise prend aujourd’hui une ampleur médiatique sans précédent, porté par des modèles désormais essayés et validés par l’ensemble de la presse spécialisée et des professionnels du deux-roues. Toutefois, il convient de tempérer cette dynamique : les marques chinoises restent encore en retrait face aux géants japonais et européens, du moins en matière de volumes de ventes. En 2024, il fallait descendre à la 8ᵉ place du classement des constructeurs de trails pour trouver… la CFMOTO 800 MT, avec 742 immatriculations. Un chiffre en hausse de 37 % par rapport à l’année précédente, qui témoigne d’une véritable confiance du public, alors même que le modèle n’a pas évolué ! Cette moto, pragmatique et bien équipée, que nous avons eu le plaisir d’essayer sur le long terme, dépasse aujourd’hui en volume la KTM 790 Adventure (449 unités), dont elle s’est fortement inspirée et avec laquelle elle partage même la chaîne de montage dans l’usine chinoise commune. Mais il faut également nuancer : si l’on cumule les ventes des KTM 890 Adventure et 890 Adventure R “made in Europe”, la marque autrichienne reprend l’avantage avec 516 immatriculations. Et ce, malgré une conjoncture difficile, qui a conduit KTM à cesser la commercialisation de CFMOTO dans ses propres concessions en Espagne et en Italie. Reste que l’arrivée imminente de modèles encore plus offensifs comme la CFMOTO 800 MT-X ou la très attendue Kove 800X risque de secouer davantage les positions établies. Le prix des trails de moyenne cylindrée n’a cessé d’augmenter ces dernières années. Même la Ténéré 700 a franchi depuis longtemps la barre psychologique des 10 000 euros. Avec des motos proposées à 9 990 € aussi performantes qu’équipées, les constructeurs chinois savent qu’ils peuvent déstabiliser le marché. Face à une KTM 890 Adventure R vendue 16 649 € sans le Tech Pack, ou à une Ténéré 700 “de base” à 11 199 €, difficile pour le motard lambda de ne pas s’interroger. D’autant plus lorsque Voge propose une DS900X “full options” à 10 999 €, issue des mêmes lignes de production que la toute nouvelle BMW F900GS, affichée, elle, à 14 900 €… hors options.

Réseaux, SAV, image :  les clés d’un changement d’échelle

Trois critères restent néanmoins décisifs pour les acheteurs : le maillage du réseau, la fiabilité du service après-vente, et bien sûr, l’attachement à la marque. Mais ces trois leviers peuvent être rapidement activés par les constructeurs les plus ambitieux. CFMOTO compte aujourd’hui 155 points de vente en France et se positionne également en compétition, avec une présence en Moto2 et Moto3. Kove, dont l’image est intimement liée au Dakar par la passion de son fondateur, a démontré sa fiabilité sur une épreuve où bien des constructeurs européens ou japonais n’osent plus s’aligner. La marque aligne déjà une quarantaine de points de vente pour la gamme Rally, et plus de 40 autres pour la gamme Trail, toute récente. Benelli et Voge disposent chacun d’un réseau de 150 concessions à travers l’Hexagone. Zontes en affiche 145. Certes, leurs enseignes ne rivalisent pas (encore) en standing avec celles des grandes marques européennes, mais elles sont désormais présentes sur l’ensemble du territoire. À titre de comparaison, Honda compte 159 concessions, Yamaha 199. La question de la garantie n’a pas été négligée non plus : 5 ans pour CFMOTO et Voge, 3 ans pour QJMOTOR et Benelli. Ce sont même ces marques qui ont forcé les leaders à revoir leur copie. KTM et Yamaha offrent désormais respectivement 4 et 5 ans de garantie.

Des trails chinois au niveau, et parfois même en avance

Nos différents essais de modèles chinois ces deux dernières années montrent que la Chine a largement comblé son retard, voire pris l’avantage sur certains points, notamment en matière d’électronique embarquée. Reste une question plus philosophique, mais essentielle dans un monde que nous souhaitons durable : celle de l’éthique. Si l’on apprécie de savoir nos motos construites par des ouvriers allemands ou autrichiens, il faut accepter d’en payer le prix. Car si l’industrie chinoise tire les prix vers le bas, c’est aussi grâce à des sacrifices que nous ne voulons pas toujours regarder en face. Ce n’est pas forcément aux marques chinoises qu’il faut reprocher cette réalité, mais à l’industrie mondiale, qui depuis longtemps délocalise sans scrupule la majorité de sa production dans ces usines à la main d’œuvre aux coûts plus bas… jusqu’à ce que fatalement, ils augmentent, puisque les chinois commencent eux aussi à rêver d’évasion aux guidons ses motos qu’ils construisent !

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